Edmond Albius, l'enfant esclave et l'Orchidée ! |
|
conte pédagogique par Christophe Montrose |
|
Ce conte à tourné entre le 20 novembre et le 20 décembre 2014 à l'île de La Réunion |
|
calendrier de tournée | Article |
En 1998, Jean-Paul Cathala, auteur (et fondateur de la troupe de Théâtre Avant-Quart), m’avait écrit une pièce sur mesure : « EDMOND LA VANILLE ». Nous avons joué cette pièce un peu partout en France. Au travers du destin particulier d’un enfant noir, elle abordait très largement le « phénomène » de l’esclavage et les conditions de son abolition. J’ai pensé qu’il serait utile de reprendre ce thème sous la forme d’une Conférence-Théâtrale pour faire découvrir aux enfants de France le destin d’un autre enfant de là-bas et aux enfants de la Réunion l'histoire d'un autre enfant de chez eux : Edmond Albius. Bien sûr, ce destin est prétexte à les amener à réfléchir à ce terrible esclavage. Cette conférence théâtrale est un « conte pédagogique » interactif qui, à l’aide d’un diaporama, de poèmes, d'un tambour, d’un Bobre et d'extraits de maloyas, permet de faire re-découvrir aux jeunes, avec humour et sensibilité, l'histoire de l'esclavage réunionnais à travers les yeux d'Edmond Albius. Douze enfants seront sollicités pour dire à leurs camarades les articles de loi de l'Abolition de 1848. Le comédien encouragera les questions/réponses pendant la représentation et animera le débat qui s'en suivra. Originaire de la Martinique, je tenais depuis longtemps à raconter cet épisode fondamental de notre histoire commune. Cette conférence théâtrale, d'une durée d'une heure dix environ, est parfaitement adaptée aux jeunes spectateurs de 8 à 13 ans (du cycle 3 du primaire à la 4ème du collège). Elle peut aussi être prévue en matinées ou soirées tout public dans des Théâtres, Centres Culturels, Bibliothèques et Médiathéques. A l'issue de ce « conte pédagogique », les jeunes seront invités à livrer leurs points de vues, à prendre des notes et poser toutes les questions qu'ils jugeront utiles. Christophe Montrose |
L’HISTOIRE |
Ils furent arrachés à leur terre d’Afrique par violence, souvent avec la complicité de leurs chefs ou de trafiquants Arabes. On les jetait enchaînés à fond de cale. Beaucoup mouraient en chemin. Un matin, dans la poussière et la moiteur d’une place publique, ils se retrouvaient exposés aux yeux de propriétaires blancs qui les palpaient comme des bêtes en discutant leur prix d’achat. Les hommes s’en allaient d’un côté, les adolescents d’un autre, les femmes avec leurs enfants les plus jeunes se retrouvaient ailleurs... |
ELEMENTS PEDAGOGIQUES - LES PRINCIPAUX PERSONNAGES HISTORIQUES |
EDMOND ALBIUS : esclave. Ses ancêtres venaient d’Afrique. Né en 1829 à Sainte-Suzanne de Pamphile dont on ne sait presque rien et de Mélise morte en mettant l’enfant au monde. Il appartient à la famille Bellier Beaumont. Curieux de tout, il attire l’attention de son maître Féréol Bellier qui fait son éducation d’horticulteur sans pour autant lui apprendre à lire ou à écrire. A douze ans, Edmond découvre la fécondation artificielle de la vanille, et fait la fortune de ses maîtres et de toute l’île. Une légende tenace veut que Bellier Beaumont ait affranchi son jeune esclave. C’est faux : Edmond fut affranchi comme les autres le 22/09/48 par la République et reçut le patronyme ridicule de ALBIUS (Le BLANC). Là, il quitte le domaine de son maître, erre dans les faubourgs de Saint-Denis (il a 19 ans), se fait engager comme aide cuistot chez un militaire. En 1851 il est condamné à cinq ans de réclusion et à la chaîne, après un procès bâclé, pour tentative de vol de bijoux avec effraction. Libéré en 1853 pour conduite exemplaire, il retourne à Sainte-Suzanne où il épouse Marie-Pauline RASSAMA, une couturière, qui bientôt mourra. Rongé de fièvre, épuisé, il s’éteint à l’hôpital communal de sa ville natale le 9 août 1880. |
SARDA GARRIGA : le nouveau Commissaire de la République de 1848, débarque à Saint-Denis le 14 octobre (il est originaire des Pyrénées-Orientales) et, malgré de fortes oppositions, fait appliquer le décret d’abolition. Cependant il met en garde les futurs affranchis contre toute interprétation abusive : « La liberté, c’est le premier des besoins de l’humanité, oui, mais ce suprême bienfait impose d’autres obligations. La liberté élève le travail à la hauteur du devoir. Être libre, ce n’est pas avoir la faculté de ne rien faire, de déserter les champs, les industries... Le travail, est une mission imposée à l’homme par Dieu ». Désormais la population affranchie de la Réunion s’élève à 62.151 individus. |
LECONTE DE LISLE : est né à Saint-Paul de la Réunion en 1818. A 19 ans, il part pour la Bretagne poursuivre ses études. Il passe deux années encore à Bourbon (1843 - 1845). De 1845 à 1848 il est à Paris où il se fait l’actif propagandiste des idées républicaines et anti esclavagistes. Dès l’apparition des «Poèmes Antiques» (1852), il devient le chef de l’Ecole Parnassienne, en réaction très nette contre le Romantisme. Les «Poésies Nouvelles», puis les «Poèmes Barbares» (1862) et les «Poèmes Tragiques» (1886), par l’originalité des termes, la grandeur des symboles, la richesse de l’exotisme et la perfection constante de la forme, le placent immédiatement après Victor HUGO, à qui il succède à l’Académie, en 1886. Il meurt à Louveciennes en 1894. | ||
FEREOL BELLIER BEAUMONT ET SA SOEUR : Sans doute les deux propriétaires successifs d’Edmond ressemblaient-ils à ces créoles nonchalants, riches et parés à la dernière mode de Paris. Féréol était célibataire et passionné de plantes exotiques dont la Vanille bien-sûr, de laquelle Edmond réussira la fécondation. A la décharge de Féréol, il faut savoir que jusqu’au bout, avec quelques amis, il tentera de faire reconnaître son esclave comme l’inventeur réel de l’insémination de la vanille, sans d’ailleurs y parvenir. | ||
L’ESCLAVAGE : Le tristement célèbre « Code Noir » édité sous Louis XIV permet et règlemente la traite des esclaves. Venus surtout d’Afrique. Enlevés sauvagement à leur famille, leur village, leur terre, enchaînés au fond de cales sordides, ces hommes, femmes, enfants sont emportés pour la plupart aux Amériques où ils deviendront des animaux liés aux maîtres blancs qui les achètent à vil prix et les épuisent à la tâche sans les considérer à aucun moment comme des êtres humains. Certains d’entre eux sont convoyés vers Bourbon où ils seront offerts, nus, aux enchères des propriétaires, comme un animal de trait. A dater de cette acquisition, ils deviennent la propriété de quelque planteur. On leur donne un prénom de fantaisie, ils devront travailler toute leur vie en échange d’un peu de nourriture et d’un pauvre toit de palmes. Gare à celui qui tente de s’échapper. Celui-là est appelé «marron». | ||
On le traque impitoyablement dans les montagnes où il tente de fuir. Attrapé, on le tue. Pour prouver la capture, on rapporte sa main ou une oreille. Certains blancs vivent de cette chasse. Lorsque en 1848 l’esclavage est définitivement aboli, les anciens esclaves reçoivent un nom arbitrairement choisi par les représentants de la République Française et se retrouvent livrés à eux-mêmes, sans travail, sans nourriture, sans toit. En effet, les propriétaires ne tiennent pas à transformer leurs anciens esclaves, qui leur coûtaient si peu, en ouvriers qu’ils devraient rémunérer. Il faudra des années pour que ces êtres réapprennent à vivre normalement et parviennent à s’organiser un tant soit peu. |